En plus d’enseigner la génération de texte dans le cadre d’un séminaire inofficiel à INALCO, Jean-Pierre Balpe a rédigé un manuel intitulé Initiation à la génération de textes en langue naturelle. Exemples de programmes en Basic (Paris : Eyrolles, 1985).

Enseignant et poète, Balpe combine son expérience dans les deux domaines pour réfléchir à la didactique de la poésie. Il publie plusieurs ouvrages et en 1981 obtient son diplôme de troisième cycle avec une thèse intitulée « Recherche sur quelques procédures formelles d’écritures utilisées en pédagogie » (Université Paris III), mettant en avant une pédagogie active.

« En 1974 (ou 75… ma mémoire sur ce point n'est pas précise) je publiai mon premier ouvrage pédagogique en ouvrant une voie pour un usage plus intelligent de la poésie à l'école primaire. Depuis, de nombreux écrits ont été publié dans ce domaine. Cet ouvrage fut suivi d'une série de travaux dans le champ de la pédagogie, notamment en 1976 un ouvrage sur l'orthographe, puis une collection pour le primaire chez Nathan avec Georges Jean et d'autres collaborateurs. Mon travail "pédagogique" se terminera en 1986 avec "Promenade en poésie" chez Magnard car, à cette époque, j'avais commencé à travailler et à publier depuis longtemps en informatique. » (archivesdebalpe.blogspot.com/2016/02/en-1974-ou-75-ma-memoire-sur-ce-point.html)

Générateur de rengas (genre poétique d’origine japonaise) créé en langage BASIC présenté à l’exposition Les Immatériaux en 1985. La reproduction est ici présentée est exécutée dans un environnement DOSBox avec un cycle d’exécution de 800 instructions/seconde réalisée par Philippe Bootz. Cette version a été installée à la Rose des vents de Villeneuve d’Ascq en 1991.

Jean-Pierre Balpe (alias « Un Monde Incertain ») en parle ainsi : « En 1984 (je crois…*) je participais à la création de l'ALAMO (Atelier de Littérature Assistée par Ordinateur, acronyme dû pour une grande part à un jeu de mots sur le nom d'un autre des fondateurs : Paul Braffort) que je quittais en 1985 sur un désaccord de fond. En 1985, je fus chargé de mettre sur pied la partie texte de cette immense exposition, j'y présentais diverses œuvres d’auteurs divers dont, n’ayant plus le catalogue, je ne saurais retrouver les noms. J’y présentais pour ma part un programme, Renga qui devait se réaliser avec Jacques Roubaud mais, celui-ci, trouvant les contraintes de la génération automatique trop fortes, me le laissa en fait réaliser tout seul. En 2 mois d'exposition, ce programme a créé plus de 36.000 de ces poèmes. » (archivesdebalpe.blogspot.com/2016/03/en-1984-je-crois-je-participais-la.html)

L’Inventaire de l’exposition présente ainsi l’installation « Machines Stylistiques » du site « Texte évanescent / texte dématérialisé » de la section « Labyrinthe du langage », où Renga a été présenté : « […] à partir de dictionnaires préalablement structurés, de programmes de génération automatique de structures syntaxiques, de macro-structures textuelles, la machine peut générer un nombre infini de textes d’un type stylistique donné. Des exemples en sont ici visibles, partiellement dans les Alexandrins artificiels, dans les Nouvelles à votre façon et, de façon complète, dans les Renga dont le mode d’affichage a été prévu de façon que les lecteurs puissent percevoir l'essentiel des étapes de l’analyse informatique. » (Inventaire. Ouvrage publié à l’occasion de la manifestation « Les Immatériaux » présenté par le Centre de Création Industrielle du 28 mars au 15 juillet 1985 dans la Grande galerie du Centre national d’art et de culture Georges Pompidou)

Une reproduction virtuelle de la scénographie de l’exposition et des photos de l’installation originale sont accessibles au site lesimmateriaux.beyondmatter.eu.

Roman est un logiciel éducatif édité par le Centre national de documentation pédagogique dans la collection « Micro-savoirs : logiciels ». Conçu pour l’usage en classe, il a été programmé en BASIC pour un nanoréseau Thomson TO7/MO5, exploitant les ordinateurs déployés à l’époque dans les écoles dans le cadre du « Plan informatique pour tous ». L’enseignant pouvait gérer la classe depuis un miniserveur local, auquel les élèves se connectaient avec leurs postes client Thomson MO5. L’exemplaire conservé par la Bibliothèque nationale de France (BnF) consiste en une disquette de 5,25 pouces, accompagné d’un manuel d'utilisation de 46 pages et d’un livret de documentation pédagogique de 43 pages. Cette dernière précise qu’il s’agit d’une « deuxième édition », mais nous n’avons pas pu retrouver la trace de la première édition.

La captation ici présenté a été réalisée par Jean-Philippe Humblot, ingénieur au Département Son, Vidéo, Multimédia de la BnF, en utilisant l’émulateur DCNANORESEAU

Jean-Pierre Balpe (alias « Un Monde Incertain ») raconte sur ce travail :

« de 1981 à 1986 j’étais conseiller informatique au Ministère de l’Éducation nationale et, dans ce cadre, j'avais réalisé le logiciel "Roman" qui, à partir de demandes d'élèves produisait un texte, à partir de documents de Flaubert, Maupassant, Stendhal, Zola, etc. (je ne me souviens plus des autres) sur lequel ils devaient intervenir en proposant des modifications, ce qui, bien souvent, les amenaient à tout réécrire. Exercice donc de lecture et d'écriture simultanée. Édité alors par Nathan, ce logiciel sur disquette, dont je n'ai plus aucune trace, a été diffusé je crois assez largement. » (archivesdebalpe.blogspot.com/2016/04/je-date-cette-archive-autour-de-1983.html)

Le manuel pédagogique précise :

« Le nom de cet outil est quelque peu trompeur : ROMAN pourrait laisser croire qu’il s’agit, avec des élèves, de produire ou de travailler des textes romanesques. La réalité est plus modeste. En fait, ROMAN se veut une aide à la production de textes et si, dans un premier temps, cette production se situe dans le cadre du récit de fiction, nous verrons plus loin comment il est possible d’obtenir des textes d’une tout autre nature. ROMAN est un outil et se veut tel. Il est relativement indépendant des matériaux qu’il utilise, permettant à l’enseignant qui désire les conduire, des travaux de natures très diverses et dont certains sont esquissés dans cette brochure.

[…]

Cet outil informatique s’inscrit délibérément dans la lignée d’une pédagogie active de l’écriture. Rompant avec une pratique relativement passive de l’enseignement assisté par ordinateur, il ne veut être qu’un auxiliaire dans la pratique de la classe.

Depuis quelques années, de nombreux pédagogues se sont aperçus de l’extrême intérêt qu’il pouvait y avoir en classe d’aborder l’apprentissage de l’écrit de manière plus productrice qu’analytique et beaucoup d’ouvrages ont été publiés sur ce sujet (cf. la bibliographie en annexe).

Ce que ROMAN tente d’offrir aux enseignants, c’est :

• la possibilité de tirer pleinement parti de deux procédures formelles d’écriture par ailleurs connues et donc non déroutantes,
• la possibilité de gérer collectivement les travaux obtenus individuellement,
• la possibilité de prolonger les productions premières des élèves dans un travail de plus grand ampleur,
• la possibilité d’analyser les processus de production des textes obtenus,
• la possibilité d’inventer d’autres procédures formelles de production de textes. »

(Jean-Pierre Balpe, L’outil informatique ROMAN. Brochure pédagogique, Ministère de l’Education Nationale, Centre National de Documentation Pédagogique, Unité Logiciels Educatifs, 2e éd., 1987)

Générateur de poèmes, écrit en GW-BASIC, ici reproduit dans l’environnement de l’émulateur DOSBox avec un cycle d’exécution de 400 instructions/seconde réalisée par Philippe Bootz. Cette version a été également installée à la Rose des vents de Villeneuve d’Ascq en 1991.

Selon les souvenirs de Jean-Pierre Balpe : « Poèmes d’amour a une histoire assez bizarre : créé pour m’amuser dans les années 80, je l’ai présenté à un ami ouzbek qui l’a proposé à un petit éditeur russe qui l’a publié en édition trilingue : français-russe-ouzbek, l’ouzbek étant une improvisation de Hamid Ismaïlov sur le thème avec ses réflexions et ses hésitations. Ayant remis cette plaquette à la BNF, je ne sais plus la date, en tous cas autour de 1980. » (Communication personnelle à Erika Fülöp)

Les photos proviennent des archives personnelles de Jean-Pierre Balpe.

Voix blanches présente quatre générateurs automatiques de textes sur PC écrits en GW-BASIC : Amour, Antiaphorisme, Proverbe et Renga. Ce montage, qui les exécute dans un ordre aléatoire, a été installé à la Rose des Vents de Villeneuve d’Ascq en 1991.

La reproduction ici présentée grâce à un l’émulateur DOSBox réalisée par Philippe Bootz, s’exécutant en un cycle de 500 instructions/seconde.

Cette œuvre créée avec le logiciel HyperCard (2.1 ou 2.2) a paru dans le numéro 3 de la « revue informatique » KAOS, fondée en 1991 par Jean-Pierre Balpe et dirigée par lui KAOS était d’abord une société informatique co-fondé par Jean-Pierre Balpe en 1985, et la revue est venue accompagner cette aventure avec des créations littéraires, distribuée aux clients et aux partenaires.

Ce numéro sur disquette sorti en 1993 était une collaboration avec les n°129-130 de la revue Action poétique.

La capture vidéo ici présentée montre une reproduction par l’émulateur de Macintosh SheepShaver dans un environnement VirtualBox, réalisée par Philippe Bootz.

Autobiographie propose des récits et des textes poétiques parallèles de « journées d’une vie ordinaire » qui se déroulent dans des fenêtres verticales juxtaposées sur l’écran.

La même capture vidéo montre deux autres œuvres de Jean-Pierre Balpe. Question d’amour et de poésie est en collaboration avec le poète Henri Deluy, tandis que Réponse de J.P. BALPE à Claude ADELEN est « un générateur poétique que Jean-Pierre Balpe a créé pour répondre à un défi que lui avait lancé Claude Adelen qui lui avait fourni des règles strictes de génération. Le lecteur est autorisé à modifier les dictionnaires, mais pas de toucher aux règles de génération. À lui de comprendre les principes de construction de ces dictionnaires s’il veut préserver la cohérence des textes générés ! » (Philippe Bootz, Les basiques : la littérature numérique », Leonardo/Olats, 2006)

Ce générateur créé avec le logiciel HyperCard (probablement 2.2) a paru en 1994 dans les actes de la rencontre « Nord poésie et ordinateur », tenue le 12 mai 1993 à l’université de Lille III, intitulés A :\ littérature (Roubaix Villeneuve d’Ascq: CIRCAV-GERICO Mots-voir, 1994), dirigé par Philippe Bootz. Le volume était accompagné de deux disquettes de 3,5 pouces avec plusieurs œuvres de littérature numérique, dont celle de Balpe.

La capture vidéo ici présentée, enregistrée par Erika Fülöp, montre une reproduction par l’émulateur de Macintosh SheepShaver dans un environnement VirtualBox, mis à disposition par Philippe Bootz.

Après un écran d’ouverture montrant le dessin du Minotaure avec une jeune femme, nus dans un lit, un autre dessin de quatre figures de femme invite à cliquer pour générer un poème en hommage au poète Jean Tardieu. Les textes affichés présentent un désir inassouvi et un érotisme indirect mais renforcé par l’image de fond omniprésent.

Ce générateur HyperCard a été publié dans le n°8 de la revue de poésie numérique Alire, cofondée en 1989 par Philippe Bootz, Tibor Papp, Frédéric Develay, Jean-Marie Dutey et Claude Maillard. Il est ici reproduit par le biais de l’émulateur de Macintosh SheepShaver dans un environnement VirtualBox. La capture vidéo a été réalisée par Philippe Bootz.

Ces « Méditations sur l’esprit humain par un cerveau électronique » invitent le lecteur à cliquer pour produire des textes cette fois en prose philosophique, avec beaucoup d’interrogations et de points de suspension.

Le sujet n’a cessé d’intéresser Jean-Pierre Balpe, car le titre réapparait une quinzaine d’années plus tard dans un billet de blog attribué à Marc Hodges, figure d’auteur appartenant à l’univers de l’hyperfiction La Disparition du Général Proust . Une installation interactive réalisée en 2015 pour le Centre Culturel de Rencontre de l’Abbaye de Saint-Riquier (Somme) portera également le même titre. Comme l’auteur explique, « cette installation consiste en un grand cube noir dans lequel le spectateur peut pénétrer. Il est alors reconnu par le logiciel et une voix de synthèse essaie de décrire comment il voit cet animal qui vient de pénétrer en lui » (artnum.univ-paris8.fr/balpe/L-Esprit-Humain-2-200). Un troisième modèle de générateur existe encore sur le site de Jean-Pierre Balpe et permet de générer des « poèmes para-métaphysiques » (artnum.univ-paris8.fr/balpe/l-Esprit-Humain-Poeme-Para-Metaphysique).

Ce générateur HyperCard a paru aux éditions Ilias sur disquette de 3,5 pouces. Il fait partie des œuvres que Jean-Pierre Balpe publiera ou republiera chez cet éditeur fondé par son cofondateur de la société KAOS Ivan Graviloff, et qui proposait « les premiers "hyperlivres" sur le marché français » (Les Echos, November 8, 1994).

L’œuvre est ici reproduite par le biais de l’émulateur de Macintosh SheepShaver dans un environnement VirtualBox. La capture vidéo a été réalisée par Philippe Bootz.

Bootz écrit : « Dès 1991, Jean-Pierre Balpe génère des romans infinis. Il en publiera deux sur disquettes aux éditions Ilias en 1994 : Le masque et Paysages sans ombres. […] Le masque est un roman dont le Masque est un personnage. Le logiciel génère des pages assez longues. Elles sont composées de réflexions sur l’esprit humain qui s’intercalent avec des descriptions et des éléments d’actions. L’œuvre reprend ainsi des acquis travaillés dans d’autres générateurs comme les Croquis parisiens ou L’esprit humain . La conception des générateurs automatiques obéit au principe de la boule de neige ; ils s’enrichissent mutuellement. » (Philippe Bootz, Les basiques : la littérature numérique, Leonardo/Olats, 2006)

Générateur HyperCard a paru aux éditions Ilias sur disquette de 3,5 pouces, dans la même série que Le masque. L’œuvre est ici reproduite par le biais de l’émulateur de Macintosh SheepShaver dans un environnement VirtualBox. La capture vidéo a été réalisée par Philippe Bootz.

Bootz précise : « Paysages sans ombres […] est réalisé sous le pseudonyme de Patrice Zana, sur Macintosh sous HyperCard, logiciel dont se servira Jean-Pierre Balpe pour tous ses générateurs ultérieurs. Paysages sans ombres fonctionne sur le même principe que Croquis parisiens : il décrit des scénettes qui ne manquent pas de charme en utilisant des phrases indépendantes. Ces dernières peuvent être longues et, contrairement aux Croquis parisiens, présentent une continuité thématique qui se poursuit sur quelques phrases. » (Philippe Bootz, Les basiques : la littérature numérique , Leonardo/Olats, 2006)

Générateur HyperCard, ici reproduite par le biais de l’émulateur de Macintosh SheepShaver dans un environnement VirtualBox. La capture vidéo a été réalisée par Philippe Bootz.

Dans l’œuvre même, l’auteur explique : « "Un roman inachevé" est un roman – en cours de réalisation – qui, comme son titre l’indique, ne pourra jamais avoir de fin car ses pages n’existent nulle part préalablement à leur lecture et que chaque lecture provoque la destruction de la page lue ainsi que la génération automatique d’une nouvelle page. Chaque lecteur est ainsi le lecteur unique d’un texte inépuisable qui raconte cependant une histoire. Comme dans la réalité du vécu, il n’a de ce récit qu’une vue subjective et partiale. Seul l’échange de la communauté des lecteurs pourrait approcher d’une totalité par nature inépuisable. » (Jean-Pierre Balpe, « Le roman », dans Un roman inachevé)

Philippe Bootz précise également : « Un roman inachevé (œuvre conçue pour le ministère de la culture en 1994 et incorporée ensuite dans Romans), est prévu pour se détruire au bout de quelques dizaines de milliers de pages. Un auto-autodafé en somme, qui marque le peu d’importance de ces objets qui n’existent, on l’a compris, que dans le dispositif mis en œuvre : les flux et échanges de données entre elles ou avec les lecteurs, le présent de leur exécution, la tension entre l’infini de leurs possibles et le nombre nécessairement réduit de leurs réalisations pour un lecteur donné... » (Philippe Bootz, Les basiques : la littérature numérique, Leonardo/Olats, 2006)

Générateur HyperCard publié en 1997 dans le numéro 10 de la Alire, en collaboration avec la revue DOC(K)S. Il est ici reproduit par le biais de l’émulateur de Macintosh SheepShaver dans un environnement VirtualBox. La capture vidéo a été réalisée par Philippe Bootz.

The ELMCIP Knowledge Base présente l’œuvre ainsi : « Ces écrits satiriques utilisent le sarcasme et l’ironie pour montrer des vérités de l’être humain, ou plutôt des vérités délicates, qui sont normalement privées. Le rôle du lecteur est d’examiner des fragments générés et de trouver des liens intertextuels. Le lecteur a toujours sa propre histoire qui contribue au sens du texte. Alors le lecteur n’est jamais naïf, et, selon Balpe, chaque fois que le lecteur lit le texte, le lecteur voit un nouveau texte qui donne l’opportunité à un nouveau sens. Chaque courte épigramme décrit ou parle d’une situation différente pour un ou plusieurs personnages et ces petites anecdotes montrent des cohérences thématiques. Les femmes dans les épigrammes "glosent" ou "jurent" de la supériorité de la femme, créant un thème satirique, et des fois sarcastique, de l’élévation morale de la femme qui est prouvé ou établi avec une fausse assurance des personnages féminins. Une épigramme dit : “Evelyne glose, Evelyn jase tout le temps, Ses compétences sont reconnues de tous, Tout un chacun déclarerait ses mérites, et proclamerait sa supériorité…” Dans les épigrammes qui parlent des hommes, le texte offre un ton différent qui consiste en l’utilisation de la satire et du sarcasme dans un sens péjoratif et quelquefois vulgaire. »

Bien que cette œuvre, comme toute création HyperCard de l’époque, fût réalisée en noir ét blanc, nous avons retrouvé une capture d’écran en couleur. D’où vient-elle, et comment ? « Je n’en sais fichtre rien, commente l’auteur. Peut-être l’ai je colorisée pour un article » (communication personnelle). Nous la partageons en guise de curiosité historique.

« Hyperfiction en flux et expansion » : un générateur, des générateurs, un ensemble de blogs, une série de profils de fiction sur des réseaux sociaux, un site web…

L’auteur raconte : « Le travail concret, réel, sur La Disparition du Général Proust, a commencé vers 1980 (je ne saurais donner une date plus précise) et s’est appuyé sur mes travaux antérieurs. Près de 40 ans donc de recherche sur la génération automatique de textes littéraires. Autant dire qu’elle a traversé une bonne part de l’histoire de l’informatique et que les outils utilisés ont, depuis les premiers programmes en APL, puis en Basic, puis sous Hypercard… n’ont pas cessé de changer. » (poetiques.blogg.org/mon-site-personnel-a115641082)

Et dans un autre billet de blog : « L’hyperfiction La Disparition du Général Proust est une réflexion en acte, donc en textes, sur ce que le numérique peut apporter à l'écriture littéraire. Au-delà donc de la simple affirmation du titre qui considère l’œuvre de Marcel Proust comme le symbole le plus abouti de ce qu’est l’écriture littéraire en français, il s’agit ici de jouer sans cesse avec l’œuvre de l’écrivain choisi comme parangon des écrivains français. C’est ainsi qu’un lecteur quelque peu attentif ne tardera pas de s’apercevoir que les textes proposés dans mon hyperfiction travaillent sans cesse dans un traitement numérique et cela de multiples façons les textes mêmes de Marcel Proust. La plupart d’entre eux sont ainsi le résultat [de] traitements purement informatiques depuis la saisie des données disponibles sur Internet jusqu'au résultats finaux donnés à lire et qui sont le produit de divers traitements algorithmiques plus ou moins complexes. Que ce soit Proust Memories dont le texte est un centon infini ajusté par un algorithme relativement simple jusqu’aux Poèmes Stein (sous leurs diverses formes et, bien entendu, avec quelques traitemenst Steiniens) ou au Monde Virtuel de Faust qui reprend un très grand nombre de données proustienne pour en faire quelque chose de tellement différent qu'il est souvent impossible de retrouver les données de départ. Ce sont ainsi les algorithmes qui, plus que les thèmes, donnent leur unité à cette œuvre en flux permanent et qui ne peut s'embrasser que dans son ensemble notamment au travers des multiples parcours que propose Le Sens de la Vie où textes génératifs et non-génératifs se renvoient de multiples échos qui sont autant de témoignages de la créativité littéraire humaine. » (poetiques.blogg.org/comment-la-disparition-du-general-proust-a115641080)

« Au 1 janvier 2013, cet ensemble, créé en 2004, composé le 10 février 2013, de quarante et un blogs, est en expansion permanente. Conçu comme dynamique, il est soumis à des changements constants qui font qu'aucun lecteur ne peut être assuré d'avoir lu une quelconque version définitive qui, par nature, n'existe pas. Certains de ces blogs, dont j'ai perdu les clefs d'accès, restent figés ; d'autres évoluent sans cesse. Enfin l'hyperfiction est aussi une autofiction, autrement dit une autobiographie fictionnelle où la réalité se mélange et se confond parfois avec la fiction. Cet ensemble constitue un jeu de renvois, de reprises en miroir, de variations définissant une approche inédite de l'écrit littéraire. À cette même date, il y a eu plus de 1.800.000 visiteurs pour plus de 5.000.000 de pages vues, chiffres qui, comme chacun sait, ne signifient pas grand chose. » (poetiques.blogg.org/hyperfiction-a115641072)

Ici nous proposons une petite sélection de cet univers, ouvert dans l’espace et dans le temps et enchevêtré avec Un Monde Incertain, qui vient l’élargir et prendre (à-peu-près…) sa suite. Certains des blogs ayant appartenu à ce monde n’existe plus, certains ont été sauvegardés, souvent de manière incomplète, dans Internet Archive, que nous pouvons partager ici. D’autres survivent partiellement dans les Archives de l’Internet de la Bibliothèque nationale de France, accessibles uniquement depuis des terminaux dédiés dans une vingtaine de bibliothèques accréditées sur le territoire français, dont les sites de la BnF.

Pour les blogs préservés dans Internet Archive, il est possible de naviguer entre plusieurs captures en utilisant le timeline pour reconstituer le contenu.

• generalproust.oldiblog.com
• hyperfiction.canalblog.com
• jpbalpe.blogdrive.com
• meshaikus.canalblog.com
• lyriqueroman.canalblog.com
• sensdelavie.canalblog.com

« Hyperfiction en flux et expansion »

La nature, le début et la fin, l’étendu et les frontières d’Un Monde Incertain sont… incertains… Tout comme pour La Disparition du Général Proust, il s’agit d’un site web constitué de « dédales », d’un ensemble de générateurs, d’une série de blogs et une série de séries de vidéos produits par un collectif d’auteurs réels et fictifs, d’une « installation numérique » sur Facebook…

Ce sont des « réalisations artistiques basées pour l’essentiel sur la génération automatique de textes littéraires » attribuées à un certain (?) « Un Monde Incertain ». Le profil de cet utilisateur de Blogger nous ramène sur une page contenant une liste de « ses blogs », comprenant des blogs signés « Jean-Pierre Balpe » aussi bien que d’autres appartenant à La Disparition du Général Proust: Journal de Charlus, Poèmes Posthumes , PoésieAlpha, e-littérature, Poèmes illustrés, Mes Mémoires, Écrits mixtes, Mes archives, Monsieur Roman, Les vidéos d'Un Monde Incertain, RomanMonsieur, Béta-Roman

Jean-Pierre Balpe explique ce projet ainsi dans un billet de blog : « [M]es finalités lorsque j’ai décidé de lancer le projet Un Monde Incertain le plaçant très délibérément sur le double terrain de la littérature générative et de la vidéo, donc de la mobilité. […] L’incertitude a toujours été au cœur de mes projets d’écriture "classique" dont elle constitue une constante thématique, que ce soit dans mes romans comme La Toile La Toile (devoirdevacance.canalblog.com/archives/2021/02/06/38800069.html) ou Un Monde Flou (http://unmondeflou.canalblog.com) ou dans diverses de mes nombreuses nouvelles. Cette incertitude, d’abord pure question psychologique personnelle, a vite rencontré celle du monde où, bien que notre époque s’efforce avec ses technologies de tout maîtriser, elle se trouve au prise à de nombreux avènements qui la débordent. Ainsi, si Un Monde Incertain a été conçu avant l’apparition de la Covid, son approche s’est trouvée renforcée par l’invasion dans les médias du thème quasi obsessionnel de l’incertitude. Il n’est donc pas fortuit que je me sois, il y a maintenant, plus de cinquante ans, intéressé à la littérature générative qui, dans son principe même, s’appuyant très largement sur l’aléatoire, est la source productive d’une infinité de textes incertains.

[…] Un générateur automatique n’a ni d’intention clairement établie, […] ni de conscience. […] [S]’il donne l’impression que ce qu’il écrit à tel ou tel moment a « un sens », cette impression n’est qu’une illusion qui ne peut fonctionner que par la coopération d’un lecteur potentiel. Il y a donc, dans un projet de littérature générative, une provocation initiale : feindre l’écriture qui, dans nos sociétés, bénéficie d’un haut statut social est, d’une façon certaine, remettre ce statut en cause. Il y a là, pour le programmateur, une profonde satisfaction personnelle qui n’est pas sans interroger l’auteur que, par ailleurs, je suis. Mais là n’est pas le problème. Mon objectif étant davantage de voir comment créer une œuvre totalement originale, dans toutes ses modalités, qui resterait cependant une œuvre que l’on pourrait qualifier de « littéraire », c’est-à-dire confrontant ses mots à des lectures et, dans ce champ, ouvrant de nouvelles perspectives à ses lecteurs.

Les bases de ce projet de création étant ainsi posées, je me suis demandé […] [c]omment concevoir une œuvre d’une certaine envergure et, dans son principe même infinie et éternelle, dont le principe moteur serait un équilibre entre sa cohérence (la certitude) et ses incohérences (l’incertitude).

[…] J’avais envie d’explorer une autre voie en fixant cet éphémère dans des créations à la fois temporairement fixes et généralement mobiles. D’où l’idée d’un ensemble de créations vidéo autour d’un certain nombre de textes produits par mes générateurs qui construiraient leur cohérence par les parcours dans leur totalité. En somme un hypertexte génératif. […] La totalité d’Un Monde Incertain, dont une maquette peut-être trouvée en ligne (unmondeconfus.canalblog.com) serait une somme spécifique parmi toutes les possibilités que contient la construction volontairement structurée en divers labyrinthes, appelés « dédales » de mon site personnel (www.balpe.name) : celui des vidéoséries » (articlesdejpbalpe.blogspot.com/2021/02/a-propos-dun-monde-incertain.html)

En 2021, la série de vidéoséries d’Un Monde Incertain est déclaré achevé (Épilogue (Épilogue 1, Saison 10) ). Cela n’empêche pas que cet univers continue à exister, voire à s’étendre.

Quelques blogs appartenant à cet univers :

• mondehesitant.canalblog.com
• unmondeflou.canalblog.com
• unmondeconfus.canalblog.com
• unmondeincertain.canalblog.com
• poesiealpha.blogspot.com
• archivesdebalpe.blogspot.com
• mauriceroman.canalblog.com
• tension.canalblog.com

Depuis les années 2000, Jean-Pierre Balpe a créé tout une série d’autres blogs en son nom propre, tout en continuant parfois à jouer sur les frontières entre vie réelle (qu’est-ce ?) et fiction, entre écriture « traditionnelle » et génération automatique. Plusieurs de ces blogs recensent se archives et ses travaux théoriques et artistiques et fournissent des informations précieuses pour la compréhension de son œuvre et de sa pensée.

• photoroman.canalblog.com
• poetiques.blogg.org
• ecritsdebalpe.blogspot.com
• devoirdevacance.canalblog.com
• articlesdejpbalpe.blogspot.com
• archivesdebalpe.blogspot.com
• plutovieuxlivres.canalblog.com

Cœur et somme de l’œuvre balpienne de la dernière décennie, le site personnel de Jean-Pierre Balpe présenté comme « Un univers de génération automatique littéraire ».

L’environnement numérique du générateur s’appuyait sur quatre éléments originalement modélisés et programmés par Samuel Szoniecky : une base de données SQL, un framework (Zend PHP) pour piloter la base de données, une application Web d’administration des oeuvres, des dictionnaires et des générateurs sous Adobe Flex, un site Web sous SPIP pour diffuser les contenus générés et les liens vers de multiples médias Web (blogs, youtube...). Après la fin d’Adobe Flash en 2020, la création des œuvres et des dictionnaires ainsi que leurs mise à jour sont devenues impossibles et le site SPIP posait un risque de sécurité. L’hébergeur OVH l’a désactivé en juin 2023.

Une nouvelle version de l’environnement numérique est en cours de développement sous Omeka S et JavaScript, toujours par Samuel Szoniecky. Le site SPIP est actuellement hébergé sur un serveur de l’Université Paris 8, avec une feuille de style standard, à l’adresse artnum.univ-paris8.fr/balpe/. La fonctionnalité de créer de nouveaux générateurs est actuellement perdue.

En 2015, l’auteur raconte ainsi l’histoire de ce site : « Le travail concret, réel, sur La Disparition du Général Proust, a commencé vers 1980 (je ne saurais donner une date plus précise) et s’est appuyé sur mes travaux antérieurs. Près de 40 ans donc de recherche sur la génération automatique de textes littéraires. Autant dire qu’elle a traversé une bonne part de l’histoire de l’informatique et que les outils utilisés ont, depuis les premiers programmes en APL, puis en Basic, puis sous Hypercard… n’ont pas cessé de changer. […]

Tout cet historique, le fait que le dernier outil que j’utilisais, Hypercard, ne fonctionne plus sur les ordinateurs modernes, le fait également (non moins important) que ma conception des modélisations syntaxiques et sémantiques avaient évolué m’ont amené à demander à un ami, Samuel Szoniecky de bien vouloir m’aider à réaliser une version moderne, soutenue par Digitalarti, portable sur toute plateforme, de mes outils de génération automatique de texte. Au fil du temps, je m’étais bricolé une 2 CV et il m’a créé une voiture turbo de course qui m’a ouvert quantité de perspectives, notamment en terme de présentation publique de la génération automatique de textes. Seulement mes réalisations anciennes n’étaient plus directement utilisables.

J’ai donc décidé de créer un site personnel pour présenter le plus de travaux possibles. Cette création m’a obligé à fouiller dans les traces numériques restant sur la toile et à récupérer, en les traduisant dans d'autres formats, les données d’anciens programmes. Ce travail est en cours. À terme, tous les travaux dont je dispose encore seront présentés sur ce site. Cette nouvelle présentation m’a ainsi amené à reconsidérer La Disparition du Général Proust (cf. aussi plusieurs articles dans ce blog) en définissant un nouveau mode de circulation dans cette vaste hyperfiction sans porter atteinte à celui établi par un ensemble de blogs reliés. Cette œuvre devient ainsi encore plus réticulaire et impossible à définir dans les termes d’une définition non numérique de la littérature. » (poetiques.blogg.org/mon-site-personnel-a115641082)

Dans un autre billet deux mois plus tôt, il explique le but et la structure du site : « L'hyperfiction générative, en réseau et flux continue La Disparition du Général Proust devenant gigantesque et ses points d'accès étant très nombreux depuis Facebook, Google Drive ou Facebook [sic], j'ai décidé de créer un site qui aura deux fonctions principales :

• mettre en évidence tous les auteurs-fantômes qui sont, à la fois, autant de mes hyperonymes et autant des personnages évoqués par les uns et les autres dans de perpétuels et foisonnants renvois des uns aux autres soit comme personnages soit comme auteurs : ce sera le rôle de la rubrique Dédale des Ombres
• mettre en ligne de nombreux exemples actifs de générateurs qui permettront aux visiteurs de produire autant de textes qui le désireront dans une vision d'une littérature de flux infini et cependant cohérents. Ce sera le rôle de la rubrique Dédale des Écritures pour les textes relevant davantage de la fiction et Dédale de l'inspiration pour ceux relevant davantage de la poésie.
• mettre en ligne les vidéos (Dédale des Actes ou les bande sons ( Dédale des Paroles).
• essayer de retrouver des témoignages d'anciennes créations disparues d'Internet pour diverses raisons : Dédale des tracesainsi que des créations devenues inactives, Dédale des ruines.

Comme le lecteur l'aura sûrement compris et anticipé, cet ensemble est en fait infini et, si le Dédale des Ombres devrait s'arrêter avec la disparition définitive de l'auteur-source, les Dédale des Écritures et celui de l'inspiration, pourvu que la société OVH qui héberge actuellement ce site continue à percevoir ses frais d'hébergement possède son rythme et son autonomie propre. » (poetiques.blogg.org/la-nouvelle-disparition-du-general-proust-a115641078, liens mis à jour dans la citation pour pointer vers le site actuel)

Lors de son travail de programmation en 2013, Samuel Szoniecky a créé quelques tutoriels montrant l’utilisation du logiciel (encore hébergé à generator.digitalartimag.com), disponible sur cette chaine YouTube channel.

Un autre site prototype du Générateur balpien de Samuel Szoniecky permet également de jeter un œil derrière les coulisses et de tester le fonctionnement des générateurs. En cliquant sur l’icône rouge du petit bonhomme au travail à côté du logo de Paris 8 en haut de la page, on peut choisir une « œuvre » et le dictionnaire qui va avec (voir « work dictionaries » dans le menu qui apparaitra à gauche), choisir un élément dans la liste qui s’affiche, et cliquer sur l’icône rouge des deux flèches entrecroisées à côté de la fenêtre où s’affiche notre sélection. Le générateur produira un mot, un syntagme, un bout de phrase ou une phrase entière, voire davantage.

Une série de vidéos intitulée Épilogue montre des captures du site www.balpe.name, avec des commentaires de l’auteur.

Après et avec La Disparition du Général Proust, le site est aussi devenu un carrefour central, s’il en est, de l’autre « hyperfiction en flux et en expansion », “expanding hyperfiction in flux,” titled Un Monde Incertain.

Sous divers noms et formes, Jean-Pierre Balpe exerce une activité importante dans l’univers semi-fictionnel de Facebook. La plupart, sinon l’intégralité de ses publications, sont publiques.

A part ses profils Jean-Pierre Balpe (2020-) et Balpe Jean-Pierre (2008-), Rachel Charlus (2011-) est la protagoniste centrale de ce monde. L’« installation numérique » d’Un Monde Incertain (2015-) était il y a encore quelques années peuplé de douzaines de personnages-auteurs échappés de La Disparition du Général Proust (Antoine Elstir, Pierre Charlus, Gilberte Norpois, Germaine Argencourt, etc.), chacun avec son profil individuel et sa vie, ses publications et se réactions. Ces profils sont désormais déactivés et perdus.

Alexandra Saemmer commente la présence actuelle (mai 2025) de Jean-Pierre Balpe sur Facebook en naviguant sur ses profils existants.

Avant Facebook, puis en parallèle, il y avait Flickr…

« Les vidéoséries sont une œuvre collective réalisées sur la base de la génération automatique de texte. Chaque réalisateur se voit imposer deux conditions : ne pas excéder une durée de quatre minutes et utiliser obligatoirement des textes provenant du générateur Un Monde Incertain accessible sur www.balpe.name.” (www.youtube.com/@balpepoeme)

« J’avais envie d’explorer une autre voie en fixant cet éphémère dans des créations à la fois temporairement fixes et généralement mobiles. D’où l’idée d’un ensemble de créations vidéo autour d’un certain nombre de textes produits par mes générateurs qui construiraient leur cohérence par les parcours dans leur totalité. En somme un hypertexte génératif. » (articlesdejpbalpe.blogspot.com/2021/02/a-propos-dun-monde-incertain.html)

En 2021, la vidéosérie d’Un Monde Incertain est déclarée achevée (Épilogue (Épilogue 1, Saison 10)). L’auteur continue cependant à publier de nouveaux montages vidéo, et les figures proustiennes continuent à apparaitre comme contributeurs (ex. Pierre Charlus qui prend en charge la composition musicale, ou Rachel Charlus dont on lit les histoires etc.)

View YouTube playlist

Tout au long de cette exposition, nous avons cité les articles et billets de blog de l’auteur sur divers aspects de la génération automatique de texte. Le rôle de l’auteur, les automatismes associés à la lecture et à l’écriture littéraires, et les manières dont l’informatique permet de les remettre en question, sont au cœur de ses réflexions.

Son ouvrage Hyperdocuments: Hypertextes, hypermédias (Paris: Eyrolles, 1990) a marqué les esprits, de même que le collectif codirigé avec Manuela de Barros, L’art a-t-il besoin du numérique ? (Paris: Hermès Science Publications—Lavoisier, 2006).

Si certains de ces écrits peuvent être difficiles à trouver aujourd’hui, trois blogs en particulier rendent beaucoup de ces travaux accessibles et permettent d’entrer dans l’univers de Jean-Pierre Balpe d’un point de vue théorique également :

• articlesdejpbalpe.blogspot.com
• poetiques.blogg.org
• ecritsdebalpe.blogspot.com

Avant de découvrir l’ordinateur, Jean-Pierre Balpe a publié plusieurs recueils de poésie. Le catalogue général de la BnF ne trouve pas Naissance de l’aube, qu’aurait publié Mic Berthe en 1966. Un article de journal de 1968 témoigne cependant de son implication dans la rédaction de la revue IMPACT 10. Il est Secrétaire Général et contributeur régulier de la revue Action Poétique à partir de 1974. Bleus (1985) et Le Silence (1990) ont été publiés dans la collection de cette revue.

« Ayant décidé d’écrire un roman « par mails » comme il y avait autrefois des romans épistolaires, je le lance à partir de mon propre fichier d’adresses : y figurant, vous recevez aujourd’hui ce courrier. » Ainsi commence le mail préliminaire envoyé par Jean-Pierre Balpe à un nombre de connaissances début 2001. La suite précise une série de contraintes, dont certaines resteront secrètes.

Ayant reçu suffisamment de réponses, Balpe se lance dans l’aventure : « Du 11 avril au 19 juillet 2001, les internautes qui se sont inscrits, après avoir décidé du titre "Rien n'est sans dire" ont reçu chaque jour dans leur boîte aux lettres une page de ce roman inédit obéissant à un certain nombre de règles publiques et secrètes. Ayant la possibilité de répondre à l'auteur du roman, leurs mails se sont retrouvés insérés dans l'intrigue. Chacun d'entre eux, cependant, ignorait qu'il recevait une version personnelle du texte : ainsi il y a dix puissance trente versions de ce roman. L'ensemble est actuellement téléchargeable sur le site du CIREN. » (poetiques.blogg.org/mail-roman-a115641064)

Nous partageons ici la série de mails préliminaires ainsi que le texte du Mail-roman.

• archive.the-next.eliterature.org/balpe/mail-roman/mail-preliminaire-1.pdf
• archive.the-next.eliterature.org/balpe/mail-roman/mail-preliminaire-2.pdf
• archive.the-next.eliterature.org/balpe/mail-roman/mail-preliminaire-3.pdf
• archive.the-next.eliterature.org/balpe/mail-roman/mail-preliminaire-4.pdf
• archive.the-next.eliterature.org/balpe/mail-roman/mail-final.pdf
• archive.the-next.eliterature.org/balpe/mail-roman/rien-n-est-sans-dire-2002.pdf

Ce spectacle public interactif et génératif a été présenté à la Biennale internationale de poésie en Val-de-Marne, IRCAM, Paris, le 14 novembre 1997.

Compositeur : Jacopo Baboni-Schilingi
Lecture des textes : Jean-Pierre Balpe, Henri Deluy, Joseph Guglielmi
Soprano : Donatienne Michel-Dansac, percussion : Eve Payeur, piano : Jean-Marie Cottet
Avec la proposition scénographique de Michel Jaffrennou

Jean-Pierre Balpe (alias « Un Monde Incertain ») parle ainsi de cette oeuvre :

« En 1997, avec le compositeur Jacopo Baboni-Schilingi, nous avons créé un spectacle qui n’a depuis eu aucun équivalent puisqu’il s’agissait de mettre en scène trois poètes (Henri Deluy, Joseph Gugliemi et moi) confrontés au pastiche de leurs textes générés en [temps] réel, la musique étant elle aussi générée en temps réel en fonction des poèmes et de confronter ces écritures de poète à l'écriture propre à l'ordinateur (le poète aveugle). Tout était donc interactif, les poètes découvrant en temps réel, ce qui était censé être leur écriture ; les musiciens (pianiste, percu[s]sioniste, mezzo-soprano) devant réagir en temps réel aux propositions musicales de l'ordinateur. Ce spectacle n’a hélas été donné que deux fois et je n'ai plus retrouvé ses archives sur le site de l’Ircam qui, autrefois, avait une fiche sur ce programme. Un film a été réalisé sur ce spectacle par Hervé Nisic, intitulé Personne. Un extrait de travail est visible ici. » (archivesdebalpe.blogspot.com/2016/05/trois-mythologies-et-un-poete-aveugle.html)

Jacopo Baboni-Schilingi précise pour sa part : « Ni illustration musicale, ni mise en musique de textes, mais échanges de modalités différentes d’expression explorant l'ensemble des relations entre le texte et ses possibilités sonores. Six voix s’enchevêtrent ainsi en permanence à la musique pour composer une "symphonie" pour voix et instruments : la voix du poète aveugle, la voix de l'ordinateur, la voix de Jean-Pierre Balpe, la voix d'Henri Deluy, la voix de Joseph Guglielmi, la voix de Donatienne Michel-Dansac. » (brahms.ircam.fr/en/works/work/6590)

Philippe Bootz fournit également quelques précisions techniques : « Une soprano est sur scène ainsi que les trois poètes (Balpe, Deluy, Guglielmi), chacun placé devant un écran. Un générateur automatique génère, pour Deluy et Gu[g]lielmi, un texte dans son propre style (!) qui apparaît sur le moniteur placé devant lui. Ce texte est également projeté sur grand écran pour le public. Le poète doit alors lire le texte en gardant toute latitude : il peut le lire à l’identique ou le modifier. Jean-Pierre Balpe est le poète aveugle. Les textes qui s’affichent devant lui s’enrichissent peu à peu du vocabulaire et du style des autres textes générés. Dans le dispositif, ce triple générateur de textes, simulant trois auteurs distincts, est couplé à un générateur de musique conçu et réalisé par Baboni-Schilingi. Les deux types de générateurs échangent des informations sous formes de méta-données. Ce spectacle est emblématique du problème que la génération automatique pose aux auteurs : Guglielmi acceptait sans trop de problème les textes proposés par la machine mais Heni Deluy s’y confrontait, les tournait en dérision, tenant à montrer que l’auteur simulé censé le remplacer dans la production textuelle n’arrivait pas à son niveau de créateur, position pas toujours facile à tenir ! » (Philippe Bootz, Les basiques : la littérature numérique , Leonardo/Olats, 2006)

Les vidéos ici présentées sont des extraits du documentaire Personne (2000) réalisé par Hervé Nisic.

Une sélection de 101 poèmes a également été recueillie dans une publication chez Farrago (Cent un poèmes du poète aveugle, 1999).

Installation interactive et générative commandée par la mission de la langue française (Lyon, Bruxelles, Montréal, Dakar), octobre 2000-janvier 2001

Scénographe : Maurice Benayoun
Compositeur : Jean-Baptiste Barrière

Jean-Pierre Balpe présente cette œuvre ainsi :

Création simultanée dans trois villes francophones, Bruxelles, Lyon et Dakar, Labylogue se présente comme un labyrinthe de textes au sein duquel les spectateurs des différentes villes, munis d’un joystick et équipes d'un micro cherchent à se rencontrer. Ne se voyant pas, ils se parlent : l’ordinateur interprète alors ce qu'ils disent et, sur le fond bleute de la mémoire des échanges, inscrit sa propre interprétation des dialogues qu’il capte. Cette interprétation est générée automatiquement de sorte que chaque parcours est toujours unique.

Lorsque les participant se trouvent dans le même espace du labyrinthe, leur image apparait à l’écran. » (poetiques.blogg.org/labylogue-a115641036)

Maurice Benayoun précise pour sa part : « A mi-chemin entre le livre et la Bibliothèque de Babel de Borgès, les murs se tapissent de phrases générées en temps réel, qui sont autant d’interprétations du dialogue en cours. A son tour le texte fait l’objet d’une interprétation orale qui anime l’espace du labyrinthe tel un chœur de synthèse qui vagabonde sur les rives de la langue en action.

La médiation numérique introduit dans la communication des couches d’interprétation qui échappent à l’intention brouillant parfois le sens. La parole reprend alors ses droits. Elle glisse sur l’interprétation de la machine en privilégiant le contact là où la trace écrite dérive. » (www.benayoun.com/Labylogb.html)

Installation interactive et générative commandée par le musée MARCO, Museo de Arte Contemporáneo, l’AFAA et l’Alliance française (Monterey, Mexique), février-avril 2002

Scénographe : Miguel Chevalier
Compositeur : Jacopo Baboni-Schilingi

Selon la description de l’artiste Miguel Chevalier : « Métapolis est une installation de réalité virtuelle pour le Musée Marco de Monterrey au Mexique, qui immerge le spectateur dans un environnement interactif de 400m2. Elle est constituée de fragments d’images de la ville de Monterrey combinables en 2 et 3D, d’une musique générative de Jacobo Baboni-Schiling en référence à l’univers sonore de cette ville, ainsi que de textes génératifs multiculturels de Jean-Pierre Balpe reposant sur les mêmes principes. Cette création originale est révélatrice d’un principe urbain générique et imaginaire lié à toutes les mégalopoles du monde. Elle sera présentée dans différentes villes à travers le monde pour devenir la ville des villes, une ville globale et transdisciplinaire. » (miguel-chevalier.com/work/Metapolis-2002)

La capsule vidéo qui nous porte le titre « Babel Poésie », choisi par Jean-Pierre Balpe. Ce titre prête à confusion car l’auteur a réalisé une autre installation interactive sous ce titre pour le festival P0es1e à Berlin (février-avril 2004). Multilingue comme MeTapolis, cette dernière était « un générateur international de poésies qui peut produire des textes en allemand, anglais, espagnol, italien et français. Il écrit ainsi des textes pour ces nouveaux citoyens de l’Europe qui se trouvent désormais confrontés à un espace multilingue dont ils comprennent souvent des bribes sans parler correctement la plupart d'entre elles. Ces textes sont à la fois des textes-résidus, des discours chaotiques, des mélanges de mots et de notions ET de réelles poésies contemporaines produites dans un processus infini d'associations mentales : chacun de ses poèmes est totalement nouveau et il est impossible d'obtenir deux fois le même. Dans son installation idéale, Babel Poesie est diffusé sur trois écrans de façon à ce que se réalise comme une performance permanente et une confrontation entre les lecteurs agissant présents. » (poetiques.blogg.org/babel-poesie-a115641040?noajax&mobile=1)

Installation de réalité virtuelle générative et interactive, en collaboration avec Miguel Chevalier. Ce travail a donné lieu à la publication d’un livre (L’Herbier, Le Promeneur, 2009) et d’un livre d’artiste en coffret (Herbarius 2059: 12 graines, Bernard Chauveau éditeur / Le Néant Éditeur, 2013).

Selon la présentation de l’œuvre sur le site de l’artiste : « Herbarius 2059 est l’avatar numérique issu de la longue tradition de l’Herbarius. Herbarius 2059 possède encore l’aspect d’un livre mais il mêle réel et virtuel et présente des textes et images générés en temps réel. Sur un album de douze feuillets blancs sont projetés côte à côte une fleur fractale de Miguel Chevalier qui évolue sous les yeux du lecteur et un texte génératif de Jean-Pierre Balpe. Chaque graine virtuelle correspond à un signe du zodiaque. Miguel s’inspire de l’Herbarius historique pour créer un nouvel herbier virtuel composé de "Fractal Flowers", des graines virtuelles autonomes qui naissent aléatoirement, grandissent, s’épanouissent et meurent pour à nouveau créer une nouvelle graine qui évoluera à son tour. Nous sommes ici dans un univers végétal très intrigant, peuplé de fleurs minérales, rappelant l’univers des cristaux. En regard de chaque fleur, le générateur automatique d’écriture conçu par Jean-Pierre Balpe nous propose une description imaginaire où la fiction est omniprésente. Il en résulte des textes générés à l’infini, se renouvelant sans cesse sous les yeux du lecteur. Herbarius 2059 est un hymne à l’hybridation, et nous ouvre la porte d’un imaginaire intemporel.

Les sources utilisées pour le texte ont été puisées dans des écrits scientifiques couvrant une large période allant du XIVe siècle à nos jours. Par ses racines, il s’inscrit dans la tradition, mais par la technologie qu’il nécessite, il se révèle d’une nature radicalement moderne. Herbarius nous entraîne vers ce que pourrait être une bibliophilie du XXIe siècle. » (www.miguel-chevalier.com/work/herbarius-2059-2009)

Jean-Pierre Balpe cite un exemple de son herbier génératif : « Qui ne connaît pas la Bugrane rampante (ou Linaria alba) une plante prolifique, en touffes, diaphanes, écartées, aux multiples usages et si souvent décrites. La fleur de la Bugrane s'épanouit sous les soleils obliques. Les fleurs de la Bugrane rampante apparaissent en septembre, répétées importantes; leurs couleurs vont du blanc au violâtre en passant par le bleu. Sa tige se divise en de nombreuses petites branches portant chacune une grosse fleur écartelée. L'huile de graine de Bugrane ajoutée à la poudre de Renoncule sert à multiplier les passions. Juillet: nombreux fruits noirs pareils à des arbouses petites. Les racines de la Bugrane rampante sont fasciculées, profondes et puissantes. Plante parfaite des arméniens, la Bugrane rampante. Habitat, habitudes: le sud du Maroc (là où le soleil prend sur lui) ou régions du nord de la Californie là où l'heure est triste. Cette plante était autrefois appelée par les allemands "Arsenic rare". Elle purge la leucotrichie par le bas. Il y a un message dans l'être de la Bugrane rampante, c'est : essaie de fuir les histoires compliquées. "quand au mois d'août mûrissent les fruits de la Bugrane rampante, tout s'achemine vers l'évanescence" écrit la romancière Albie Saperstien dans son livre "on ne devrait pas tant penser à ce qu'on fait qu'à ce qu'on est". La première description de la Bugrane rampante se trouve dans l'herbier de David Alfaro Siquieros daté de 1223. » (poetiques.blogg.org/un-herbier-numerique-a115641128)

Installation interactive en collaboration avec Nicolas Ticot la compagnie XLR-Project, dans le cadre du WeekEnd des langues à Lyon. Elle a été présentée au 18 bis Quai Saint-Vincent 69001, du 25 au 28 mars 2010.

Développement informatique : Pierce Warnecke
Réalisation 3D : José Juste
Comédienne : Aurélie Sorrel Cros

Nicolas Ticot présente le projet ainsi : « COLOR VOICE IA est une installation générative, audiovisuelle, théâtrale et participative.

Au centre du dispositif : un micro interactif. Le spectateur est invité à participer, à interroger, à occuper l’espace. Par son action, il interagit avec son environnement. Nicolas Ticot et son équipe invitent l’écrivain Jean-Pierre Balpe (Officier des Arts et Lettres, poète et chercheur dans le domaine de la relation entre littérature et informatique) à travailler sur le thème du “méta langage” à travers le "mouvement situationniste".

Grâce à un dispositif interactif développé par notre équipe nous avons intégrer et adapté une des premières intelligences artificielles génératrices de littérature crée par J-P Balpe en 1981. Nicolas met en scène le réel et le virtuel à travers un avatar projeté sur un des mur des Subsistances et d’une comédienne, Aurélie Sorrel Cros, qui erre dans l'espace de jeux et proposant aux spectateurs de discuter avec son double virtuel.

Plusieurs centaines de participants sont venus discuter avec notre avatar le 25, 26, 27 mars 2010.

Bien que le terme "intelligence artificielle" ait été formulé dès 1956, il ne faisait pas encore partie du langage courant. En choisissant intentionnellement d’explorer la complexité des sujets et des processus créatifs et technologiques, ainsi qu'un titre aussi mystérieux que techno', nous avons pu réaliser une œuvre innovante et assumée dans son approche expérimentale. » (xlrproject.net/color-voice)

Projet d’opéra interactif et génératif (réalisation incomplète)

Compositeur : Alexandre Raskatov
Scénariste : Michel Jaffrennou
Production : Ex-Nihilo

Inspiré par l’histoire de Barbe Bleue, cet opéra numérique conçu pour publication sur CD-ROM, sur le modèle des jeux vidéo, devait avoir une structure très complexe :

« Le CD-ROM contient 441 événements, 21 appartenant à la trame de l’opéra "Dieu hésite…", 420 appartenant à une trame d’événements contextuels. Une lecture est un des multiples parcours possibles de cet espace (factoriel 441 divisé par 21, soit, pour un lecteur donné, une infinité).

L’entrée dans le CD-ROM est aléatoire parmi l’un des 420 événements contextuels. Par contre, l’entrée dans la musique n’est pas aléatoire, elle est l’ouverture de l’opéra et suit toujours, pendant 42 minutes la trame dramaturgique A-B-C-…-U. Le rapport entre les événements contextuels et les événements dramaturgiques sont établis par le son : plus le lecteur est loin de l’événement dramaturgique, plus le son est faible. Il va donc devoir trouver le son, le “meilleur son” possible pour comprendre "Dieu hésite…". Les deux cas limites sont qu’il parvient à rester toujours dans l’opéra ou qu’il n’y parvient jamais.

Si, par exemple, un lecteur entre en 21, il est loin de A et il doit chercher à s’en rapprocher. S’il entre en 8, il est dans A, son problème est alors d’aller de A à B, etc… »

Jean-Pierre Balpe raconte la fin de l’histoire : « il n’y a eu qu’une maquette de présentation car les outils informatiques pour une réalisation complète n’étaient alors pas encore disponibles. En fait j’aurais voulu créer un opéra comparable aux jeux vidéo actuels dans lequel le spectateur pouvait se déplacer suivant un très grand nombre de possibilités […]. Il n’y a donc pas eu de mise en scène mais une simple présentation de la maquette à l’IRCAM sous forme de vidéo et, peut-être de CR-ROM” (communication personnelle)

Les documents de travail ici présentés montrent les réflexions approfondies sur la conception, ainsi que quelques textes réalisés. La première vidéo présente la seule production audiovisuelle du projet que nous avons pu retrouver, tandis que la deuxième est un montage plus récent par Jean-Pierre Balpe, utilisant des textes générés par le générateur prévu pour ce projet.